Le mieux est l'ennemi du bien. Pourquoi s'embêter avec 6 cordes sur une guitare quand on peut jouer avec une seule ? Pourquoi devrait-on l'accorder ? Pourquoi, finalement, jouer de la guitare quand on peut jouer du diddley bow ?

Il y a eu ce passage phénoménal de Seasick Steve chez Jools Holland. Tiens, qu'est que c'est que ce truc ?

Puis, à l'occasion du décès récent de Captain Beefheart, j'ai redécouvert ses 10 commandements du guitariste. Le septième, notamment, vaut son pesant de cacahuètes.


 
7 - Always carry a church key
 
That's your key-man clause. Like One String Sam. He's one. He was a Detroit street musician who played in the fifties on a homemade instrument. His song "I Need a Hundred Dollars" is warm pie. Another key to the church is Hubert Sumlin, Howlin' Wolf's guitar player. He just stands there like the Statue of Liberty — making you want to look up her dress the whole time to see how he's doing it.

 
 

Texte abscons et rigoureusement intraduisible puisque « clef d'église » n'est pas la seule signification de church key. Mais on comprend bien qu'un décapsuleur puisse servir de bottleneck, même si One-String Sam se servait, lui, d'une bouteille.

Ok, il m'en faut un. Une planche de bois provenant d'un encadrement de fenêtre, une corde de guitare rouillée, 6 clous, 2 vis, un micro extrait d'une pelle asiatique d'il y a 25 ans (Cyclone by EKS Technologies) sur lequel on soude une embase jack mono, une bouteille vide en guise de chevalet, un bout de tige d'acier pour le sillet et roulez jeunesse.

En cherchant des renseignements sur la fabrication, je suis tombé sur cet extrait de It Might Get Loud, film commémoratif sur la guitare électrique que j'avais soigneusement évité avec Jimmy Page, The Edge et Jack White, où ce dernier construit un diddley bow dans un décor champêtre.

Première étape : Faire un noeud à l'extrémité « libre » de la corde.

Noeud plat à l'extrémité de la corde

Deuxième étape : Fixer la corde à un bout, déterminer l'emplacement de la vis à l'autre bout de manière que la corde soit tendue, une fois la bouteille en place, visser, clouer.

Composants (la bouteille est encore pleine)

Troisième étape : Positionner le micro sous la corde, enfoncer les clous qui le maintiendront, insérer une cale pour qu'il tienne en hauteur.

Diddley Bow terminé

Quatrième étape (en option) : Marquer les emplacement des notes comme s'il s'agissait des frettes d'une guitare. À l'usage, on s'aperçoit que les points (en 3, 5, 7, 9 et 12) sont plus importants que les traits des demi-tons, surtout qu'une pression minime sur la corde a naturellement tendance à fausser l'accord. Comme les points se trouvent au milieu des cases, il deviennent les nouveaux repères des notes.

Marquages des notes

Fin des opérations : Placer la bouteille, brancher sur l'entrée de n'importe quel ampli ou assimilé (dans mon cas, celle d'un vieux portable IBM). Prendre un bottleneck, un tournevis ou, mieux, un décapsuleur : church key power! L'entrée micro sature si on pousse le gain, ce qui ne peut qu'améliorer le son quand on ne sait pas vraiment jouer en slide. Comme moi. Et dans ce cas, ça donne un petit côté Metal dont il faut bien se contenter à défaut de l'évocation habituelle du Delta du Mississipi.